Lorsque Dana Halter part en retard ce matin là pour un rendez vous chez son dentiste, elle ne se doute pas que le stop qu’elle ne marquera pas va bouleverser sa vie. Le policier qui note l’infraction fait alors les contrôles d’usage et devant la liste des méfaits commis par Dana Halter est contraint de la menotter sur le champ. La professeur de littérature en langue des signes ne comprend pas. Elle ne comprend pas d’autant qu’elle ne peut quasiment pas communiquer avec un « entendant ». Car Dana Halter n’entend plus depuis l’âge de 8 ans suite à une méningite. Elle sait parler au prix de nombreux efforts mais ils sont vains face à l’agent de police.
"Talk, Talk" de T.C. Boyle, Grasset, 2006 (EU), 2007 (F)
Mise en prison, la jeune femme voudrait clamer son innocence mais la justice s’est mise en marche, une justice qui peut broyer les innocents, qui humilie. Rapidement l’usurpation dont Dana est la victime, est prouvée. Son compagnon, Bridger est à ses côtés et ensemble ils vont chercher le voleur, ce violeur d’identité.
T.C. Boyle déjà auteur de l’excellent « América », critique sévère des classes moyennes américaines enfermées dans leur résidence ultra surveillée et proprette contre l’immigration clandestine venue du Mexique, épingle une nouvelle fois la société dans laquelle il vit. Il met en scène les failles d’un système qui pousse à la consommation, au crédit, qui connaît ses propres failles mais ne les comble pas, qui rejette la différence et considère des handicaps qui ne le sont pas... Une société qui parle trop, le « Talk, Talk » des malentendants. Rien de neuf, me direz vous, mais le style de Boyle est là et ce roman noir m’a tout simplement capturé. Surtout ses réflexions sur la surdité sont tout simplement passionnantes et m’ont ouvert à un monde méconnu. C’est sans conteste l’une de mes meilleures lectures de cette année. Un roman noir remarquable d’intelligence et d’efficacité, même s’il ne fera pas l’unanimité j’en suis certain. Décidément l’un de mes auteurs favoris !