« Une habitante du quartier meurt poignardée devant chez elle ». C'est par cette simple phrase qu'un journal signale l'assassinat sauvage de la jeune et jolie Catherine Kitty Genovese. Un meurtre horrible commis par Winston Moseley, tueur en série dans l'Amérique des années 1960. Agressée devant chez elle, alors qu'elle rentrait du bar où elle travaillait, Moseley s'est acharnée sur sa victime, prenant plaisir à la voir agonisé, et tout cela devant près de 38 témoins, directs ou non. 38 personnes qui n'ont pas voulu bouger, appeler la police ou tenter d'effrayer le meurtrier, mais ce sont contentées de refermer leurs rideaux ou de se rendormir malgré les hurlements de la jeune femme.

 

Ce meurtre qui bouleversa l'Amérique (à l'origine de la création du numéro d'urgence 911) et que Didier Decoin ressort du passé, sert de prétexte à dénoncer un événement dramatique entre lâcheté humaine et non-intervention de chacun comprise par la répartition de la charge de responsabilité. Autrement dit, lorsque plusieurs témoins sont confrontés à une situation d'appel à l'aide, chacun se repose sur l'autre...

 

Un roman dur où les atrocités de Moseley ne nous sont pas épargnées, et qui explore la part la plus sombre de l'âme humaine... L'auteur nous met dans la peau des témoins bien évidemment avec l'inévitable interrogation : qu'aurions-nous fait ? Le meurtrier est à sa place, froid, sanguinaire et cynique... Mais l'accusation se déplace vers les témoins et des témoins au lecteur. Un roman à l'écriture efficace, dérangeant (voir Clarabel) loin de tout moralisme, qui met mal à l'aise par tant de voyeurisme. En cela le romancier a réussi son œuvre : nous faire réagir en tant qu'être humain et nous laisser face à nos interrogations. Sans doute pour nous rappeler nos failles...

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